Il m'est arrivé de rencontrer des parents inscrivant leur enfant à des cours de chant, et n'osant pas me dire qu'ils aimeraient bien faire de même.

J'ai aussi rencontré des adultes persuadés que "pour bien faire, il aurait fallu commencer jeune », ou qu’un adulte qui chante mal n’est pas fait pour le chant.

Ces idées reposent-elles sur une réalité scientifique ?

La capacité d’apprentissage est liée à la capacité de connexion des cellules de notre cerveau, les neurones.

Il a été considéré pendant un temps que les cellules se connectaient pendant l'enfance, ce qui pouvait signifier que tout ce qui n'avait pas été approché avant l'âge adulte devenait extrêmement compliqué en vieillissant. 

Mais les études les plus récentes sur la plasticité neuronale ont démontré que l'apprentissage en lui-même fait évoluer nos connexions : à l'âge adulte, un apprentissage efficace est donc toujours possible. 

Le cerveau, capable d'apprentissage à tout âge

Ajoutez à cela qu'en tant qu'adulte, vous êtes dotés d'une capacité d’analyse et de concentration supérieures à celle d'un enfant ; il n'est donc jamais trop tard pour apprendre une activité que l'on a réellement envie de pratiquer.

Si la capacité est présente, mais que l'apprentissage semble plus difficile, c'est probablement que d'autres paramètres entrent en jeu.

La question devient alors :

En quoi pouvons-nous nous inspirer

des enfants pour mieux apprendre ?

LES CONDITIONS FAVORABLES CHEZ LES ENFANTS 

1) Les enfants expérimentent la nouveauté.

Les enfants sont curieux de tout et tentent par eux-mêmes de réussir ce que les adultes sont capables de faire. Ainsi, pour la voix, ils essaient de parler de toutes sortes de manières possibles : par l'imitation, en jouant avec leur voix, en testant tout ce qui leur vient à l'esprit...

Les adultes sont souvent plus craintifs de ce qu'ils ne connaissent pas et rechignent souvent à sortir de leur "zone de confort" pour aller explorer des territoires nouveaux. Apprendre à chanter implique de sortir de sa zone de confort par moments, et cela peut impressionner davantage un adulte.

2) Les enfants focalisent moins sur leurs risques d'échec.

Les jeunes enfants n'ont pas peur d'être ridicules en jouant avec leur voix : ils s’amusent au contraire des sons étranges parfois obtenus.

A contrario, avec le développement de l'ego, l’adulte se compare aux autres, et se demande ce qu’ils pensent de lui. L’adulte se juge, parfois durement, et peut être obsédé par la perfection.

En chant, on retrouve des cas assez classiques d'élèves qui n'osent pas utiliser les sons temporaires en technique vocale, qui n'osent pas incarner les émotions en interprétation, ou n'osent pas utiliser leur corps en présence scénique.

Certains adultes n'osent pas non plus travailler leur voix suite à des remarques blessantes remontant parfois à l’enfance. Dans tous les cas, la peur d’échouer ou de paraitre ridicule freine la découverte.

3) Les enfants ne mesurent pas leur performance à l'aune du temps passé.

Les enfants répètent souvent leurs jeux vocaux, ils peuvent même répéter un son en boucle, à tel point que cela peut devenir fatigant pour les parents !

Ils apprennent à faire des sons, puis des mots, puis des phrases simples, et enfin des phrases complexes, en quatre ans environ. Aucun ne s'interrompt en pensant que le temps est long : ils trouvent du plaisir à simplement développer leur exploration jour après jour.

Les adultes ont d'autant plus de mal à accepter ce jeu exploratoire que notre société favorise la satisfaction immédiate, et nous fait croire que la notion de « long terme » est forcément associée à celle de « pénible ». Beaucoup d'adultes croient aussi que chanter est inné et que « si ça te prend du temps pour progresser, c'est que tu es nul ».

4) Les enfants bénéficient de larges plages horaires réservées à l'apprentissage avec des adultes expérimentés qui les stimulent.

Les parents et la famille sont les premiers adultes qui contribuent à la formation de l’enfant au quotidien. Les jeux, puis l’environnement scolaire et les différents loisirs, sont également des formes d'apprentissages variées.

Une fois dans la vie active, les occasions d'apprentissage sont en général à l'initiative de l'adulte lui-même, et peuvent se trouver d’autant plus raréfiées que d’autres activités s’ajoutent (obligations professionnelles et sociales, éducation de ses propres enfants…), ou que l’adulte est persuadé qu’il est trop tard pour apprendre.

COPIER LES ENFANTS POUR PROGRESSER EN CHANT

Utilisons donc ces principes et adaptons-les au contexte d'un adulte qui veut apprendre à chanter :

1) Se mettre dans un contexte spécifique et régulier d'apprentissage avec une personne expérimentée.

En tant qu'adulte actif, vous bénéficiez souvent de moins de temps disponible pour votre apprentissage ; en ce sens, les cours individuels avec un professeur compétent vous offrent un contexte dédié à 100% à vos besoins propres.

L’important est de vous aménager des moments privilégiés et réguliers pendant lesquels vous pouvez vous consacrer entièrement au plaisir d’apprendre à chanter.

Cela signifie que vous expliquez aussi clairement à votre entourage que vous ne souhaitez pas être dérangé pendant ce travail. Si vous vous épanouissez dans cette activité, vous serez aussi plus épanoui quand vous reviendrez vers eux !

2) Aborder le travail de la voix avec curiosité, et sans jugement de soi. 

Aussi difficile cela soit-il à accepter parfois, les erreurs sont des sources essentielles de progrès. Faire évoluer notre rapport à l'erreur et l'échec est essentiel pour vivre sereinement son parcours vocal.

Les cours sont l’occasion d’avoir un retour régulier par un professeur qui n’est pas là pour vous juger, mais pour vous guider dans votre exploration et répondre à toutes vos questions.

Vous allez comprendre le fonctionnement de votre voix, comment expérimenter avec elle, et comment l’évaluer sur de bons critères, plutôt que de ressasser des critiques improductives. 

3) Apprécier le fait que tout apprentissage demande du temps. 

Quelle que soit l’activité, il n’existe pas de baguette magique pour l’apprendre instantanément. 

Par contre, vous pouvez être certains que si vous travaillez régulièrement, vous allez fatalement progresser !

Vous avez mis environ 4 ans pour apprendre à parler de manière élaborée, et souvent plusieurs années pour apprendre un métier. Pourquoi ne pas consacrer le temps que vous souhaitez à une activité qui vous plait ? "Ce qui s'apprend lentement s'oublie lentement", dit l'adage !

4) Se créer un univers stimulant pour l'apprentissage. 

Vous pouvez écouter différents styles de musique, rencontrer d'autres chanteurs, aller voir des concerts, chanter pour (ou avec !) votre famille aux occasions spéciales... Toutes les occasions sont bonnes pour donner plus de dimensions à votre apprentissage, et le concrétiser de la manière qui vous plait le plus.

L'implication dans le travail est également augmentée quand un objectif concret est en jeu.

Pour n'en citer que quelques exemples :
    - participer à des karaokés, des soirées open mic
    - enregistrer en studio
    - monter un groupe
    - créer une chaine Youtube
    - prévoir de chanter à un évènement
    - etc
sont donc autant de bonnes occasions de donner plus de sens à votre apprentissage.

Conclusion - un coach vocal américain a eu ce bon mot sur l’apprentissage du chant : 

"Vous serez trop vieux quand vous serez mort !"