Pourquoi les Shadoks ont tort et raison à la fois, et la mémoire des muscles

et qu'est-ce que ça a à voir avec le chant ?

 

Une petite série animée des années 70 a rencontré un grand succès, il s'agit des Shadoks. Ces oiseaux bizarres et pas très malins ont une logique bien à eux, à la fois absurde et amusante.

Il m'arrive parfois de citer aux élèves une devise des Shadoks : "plus ça rate, plus on a de chances que ça marche".

En quoi cette drôle de loi statistique est-elle intéressante par rapport au chant ?

  

1° Les Shadoks ont raison

Les Shadoks nous disent que les difficultés et la répétition font partie du jeu, et que la réussite n'intervient pas toujours dès le premier essai. 

Les progrès sont souvent rapides quand on débute le chant, mais vient toujours un moment où l'on stagne. Quand on devient plus expérimenté, les périodes de stagnation et le sentiment d'échec reviennent à intervalles réguliers avec les nouveaux challenges.

 

Il y a 2 réactions possibles : soit on abandonne dès que les progrès ralentissent, et on n'ira pas loin. Soit on accepte que les échecs font partie de l'apprentissage, et qu'avec de la persévérance on finit par surmonter le problème.

Statistiquement, 100% des gagnants ont tenté leur chance, comme dit le slogan ; a contrario si on baisse les bras on est certain de ne jamais réussir !

La répétition et l'échec font partie du travail d'apprentissage ; la patience est une des clés de la réussite, même si c'est parfois très long.


  

2° Les Shadoks ont tort

Il y a une loi dans notre univers qui n'a pas forcément cours dans celui des Shadoks, qui est : à même cause, même effet.

Passez votre main sous l'eau, elle sera toujours mouillée, même si vous avez envie qu'elle reste sèche. Si votre geste de frappe envoie une balle de tennis vers le bas, elle ne passera jamais le filet du court (sauf si vous avez des pouvoirs Jedi, mais on parle alors d'un autre univers).

 


C'est la même chose pour le chant : si vous approchez toujours une difficulté de la même manière et que cette manière ne fonctionne pas les premières fois, il y a peu de chance pour que vous finissiez par résoudre le problème ainsi.

Si vous vous crispez pour atteindre une note haute, elle sonnera toujours crispée et fatiguera votre voix, même si vous aimeriez qu'il en soit autrement. Vous pouvez tenter cinquante fois en tentant de varier le degré de crispation, le résultat restera similaire : un timbre globalement crispé et une voix qui fatigue.

Dans ce cas, la répétition entraîne non pas le succès, mais l'échec.

 

3° La mémoire des muscles

Nous sommes des êtres d'habitudes : nous sommes psychologiquement rassurés par ce que nous connaissons déjà. C'est le principe de la publicité : si vous avez vu 50 fois la lessive A à la télévision, vous aurez plus tendance à acheter la lessive A dans le magasin parmi d'autres marques similaires.

D'autre part, notre corps intègre et renforce dans son fonctionnement ce que nous pratiquons de manière répétée.

L'avantage est que si une habitude (vocale ou autre) est bonne, elle devient de plus en plus facile avec les répétitions ; l'inconvénient est que si une habitude est mauvaise, elle le sera toujours, et il deviendra de plus en plus difficile de s'en débarrasser avec le temps.

 

Autrement dit, plus on crispe, plus l'habitude de crisper se renforce d'elle-même. C'est ce que l'on appelle, de manière imagée, la mémoire des muscles, puisqu'à ce stade, nous n'avons plus conscience de chercher à forcer, c'est devenu un réflexe.

Heureusement, la mémoire des muscles marche aussi dans le sens favorable : plus on pratique le bon geste technique vocal, plus la facilité augmente, nous autorisant ainsi à nous concentrer davantage sur autre chose (ex : la relation avec le public).

 

 "Tu dois désapprendre ce que tu as appris, jeune padawan"

 

Conclusions

- Quand vous bloquez, expérimentez différentes manières. Jouez avec votre voix et avec les sons, ne vous enfermez pas dans un cercle vicieux ; si une approche ne fonctionne pas, tentez l'inverse, même si cela vous semble contre-intuitif !

- Ne craignez pas de demander de l'aide rapidement ; les professeurs de chant qui, comme moi, sont formés à la pédagogie de cause à effet, savent comment rendre vos gestes vocaux plus efficaces. Avec les bons outils, la voix se débloque parfois très vite, mais plus vous aurez renforcé une mauvaise habitude, plus il vous faudra d'efforts pour vous en débarrasser.

- Laissez du temps au temps : tout apprentissage demande de la patience, surtout si vous visez haut. Au lieu de vous marteler à coups d'autocritique, apprenez à apprécier le processus de recherche en lui-même, et la mise en place progressive de l'équilibre !

 


 

Pourquoi les Shadoks ont tort et raison à la fois, et la mémoire des muscles
Diane Douet 30 septembre 2017
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